Linguistique

Le développement durable apparaît comme la panacée aux crises économiques, écologiques et culturelles de notre temps (cf. Fladvad/Hasenfratz 2020: 13). Principe directeur fondamental de notre époque, le concept enchevêtre indissolublement les dimensions économiques, écologiques et sociétales (cf. Pufé 2014: 17, voir aussi les 17 objectifs du développement durable des Nations Unies, dont entre autres l’éducation de qualité, l’élimination de la pauvreté et la réduction de l’inégalité, aussi entre les sexes, https://pactemondial.org/17-objectifs-developpement-durable/).

Vu son statut de mot-clé (cf. Henn-Memmesheimer et al. 2020: 13; 29), il n’est point étonnant que la réflexion linguistique sur le(s) discours concernant le développement durable soit aussi bien établie dans les études de langue allemande (entre autres Janich 2013; Tereick 2016; Münch 2020; Wengeler 2018; Janich/Kilian 2022; Gansel/Luttermann 2020) que dans les sciences du langage en France (p.ex. Bihannic/Michel-Guillou 2011; Catellani 2015; Vargas 2016; Catellani/Errecart 2017; Lippert 2022; Bureau 2022; Dal/Namer 2022). Il est donc d’autant plus frappant que la présence de l’analyse du discours sur le développement durable soit si faible dans le contexte universitaire allemand, qu’il s‘agisse des études franco- (Rentel 2025; Rentel 2022; au sens le plus large aussi Drescher 2022), hispano- (p.ex. Hollstein/Mengert 2024) ou italoromanistiques (p.ex. Glausch 2017).

La section que nous proposons vise à favoriser les échanges sur les différentes approches linguistiques de la recherche sur le discours concernant le développement durable aussi bien d‘un point de vue théorique et conceptionnel qu‘au niveau méthodique et analytique. À cet effet seront prises en compte les études germanophones portant sur les langues romanes, mais aussi les différentes approches francophones.

Au-delà des concepts plutôt classiques comme les métaphores et les topoï (pour plus de détails sur les schémas de pensées chez les partis populistes voir Sommer et al. 2023), qui sont appliqués autant dans les études de langue allemande (Warnke/Spitzmüller 2008, Wengeler 2003, Römer 2018, Kreuz/Wengeler 2014) que romanes en Allemagne, nous souhaitons encourager l’exploration de concepts plutôt délaissés dans le contexte allemand jusqu’à présent.

Il convient de mentionner ici les concepts aristotéliciens de l’ethos (la construction d’une image de soi crédible) et du pathos (la construction discursive des émotions), fortement ancrés dans l’analyse du discours et de l’argumentation francophone (au sujet de l‘ethos voir Amossy 2001; 2008; 2010; 2014; 2021; 2022; Maingueneau, entre autres 2014; 2022; Hatano-Chalvidan/Lemaître 2017; Ducrot 1984; plus récemment sur le concept de l‘ ethos collectif voir Orkibi 2008; Amossy/Orkibi 2021, au sujet de pathos voir Charaudeau 2008; Rinn 2008; Plantin 1999; Micheli 2010; 2014; Nicolas/Buidin 2020; Kacprzak 2013; dans la romanistique allemande voir Eggs 1999; en rapport avec Logos voir Atayan 2005; 2006b; en relation avec les traditions du discours voir Gabel de Aguirre 2024). La prise en compte de l’ethos et du pathos s’avère indispensable si l’on analyse les discours sur le développement durable. En effet, la construction d’une image de soi crédible, honnête et responsable ainsi que la construction discursive des émotions (la construction de l’angoisse ou de la rage à travers des scénarios apocalyptiques, ou du bonheur via la mise en scène d’un monde harmonieux par l’emploi des images d’enfants dans les rapports de durabilité, cf. Lévy-Tödter 2020: 172) peut créer des représentations du monde qui sont à même de « dissimuler le Mal et affirmer le Bien » (Vargas 2021 : 109) et donc de déformer la réalité.

En outre, nous souhaitons encourager la prise en compte des domaines linguistiques suivants: la formation des mots (p.ex. Visser 2009), l‘euphémisme (p.ex. Krieg-Planque 2004) ou les dysphémismes, les hyperboles, les collocations, les expressions figées (p.ex. De Roberto 2013: 163), les structures syntaxiques (p.ex. Danler 2007), agency (p.ex. Irmer et al. 2024), les pronoms (p.ex. Haid 2018), les actes de langage, les implicatures (p.ex. Vargas 2021), la polyphonie (p.ex. Ducrot 1984, dans l’analyse du discours issu du contexte francoromanistique allemand voir Weiland 2020 ; Dufferain-Ottmann 2024) ou les ressources structurales et lexicales suggérant l‘incontestabilité (cf. Atayan 2006a ; Wengeler 2003: 80) ainsi que l’emploi de ressources multimodales (p.ex. Harjus 2023).

Les corpus peuvent provenir soit de communications d’entreprises privées (principalement des secteurs à forte intensité de ressources tels que le tourisme, l’énergie, les transports, la mode, la chimie ou les start-ups qui s’engagent délibérément en faveur de la durabilité), de partis politiques, d’organisations à but non lucratif (éventuellement militantes), d’autorités et d’institutions publiques (y compris les universités), soit du domaine du journalisme, notamment en ce qui concerne la spécificité du ou des discours sur la durabilité dans les médias sociaux.

Nous demandons des propositions de contribution en allemand ou en français, les résumés n’excédant pas 500 mots (bibliographie exclue). La soumission des résumés se fait à l’aide du formulaire ci-joint. Veuillez envoyer votre proposition jusqu‘au 31 janvier 2026 (date limite) aux adresses suivantes : svenja.dufferain-ottmann@uni-mannheim.de; Jennifer.GabeldeAguirre@aau.at.

Les notifications d’acceptation seront envoyées avant le 28 février 2026.

Bibliographie

Amossy, Ruth. 2001. Ethos at the Crossroads of Disciplines: Rhetoric, Pragmatics, Sociology. Poetics Today 22 (1). 1–23.

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Amossy, Ruth. 2010. La présentation de soi. Ethos et identité verbale. Paris: Presses Universitaires de France.

Amossy, Ruth. 2014. L‘éthos et ses doubles contemporains. Perspectives disciplinaires. Langage et Société 149. 13-30.

Amossy, Ruth. 2022. La notion d’ethos : faire dialoguer l’analyse du discours selon D. Maingueneau et la théorie de l’argumentation dans le discours. Argumentation et Analyse du Discours 29 (online: http://journals.openedition.org/aad/6869).

Amossy, Ruth. 42021. L’argumentation dans le discours. Paris: Armand Colin.

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Atayan, Vahram. 2005. Éléments rhétorico-argumentatifs dans des constellations communicatives complexes. In Pierre Marillaud & Gauthier, Robert (eds.), Rhétorique des discours politiques. Actes du 25e colloque d’ALBI – Langages et significations, 401–411. Toulouse: CALS/CPST.

Atayan, Vahram. 2006a. Makrostrukturen der Argumentation im Deutschen, Französischen und Italienischen. Mit einem Vorwort von Oswald Ducrot. Frankfurt am Main: Peter Lang.

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Bihannic, Lise & Élisabeth Michel-Guillou. 2011. Développement durable et agriculture durable: sens du concept de ‚durabilité‘ à travers la presse régionale et le discours des agriculteurs“. Développement durable et territoires 2 (3). 1-17.

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Catellani, Andrea & Amaia Errecart. 2017. Dialogisme et figures de l’autre dans les rapports sur la ‚Résponsabilité sociétale des entreprises‘. Exploration discursive et sémiotique. Mots 114. 57-75.

Charaudeau, Patrick. 2008. Pathos et discours politique. In Michael Rinn (ed.), Émotions et discours. L’usage des passions dans la langue, 49–58. Rennes: Presses universitaires de Rennes.

Dal, Georgette & Fiammetta Namer. 2022. Éco- lave plus vert, et il lave toute la famille. Neologica 16 (Néologie et environnement). 111-128.

Danler, Paul. 2007. Valenz und diskursive Strategien: die politische Rede in der Romania zwischen 1938 und 1945 Franco – Mussolini – Pétain – Salazar. Tübingen: Narr.

De Roberto, Elisa. 2013. Usi formulari delle costruzioni assolute in italiano antico: dal discorso alla grammatica. In Claudio Giovanardi & Elisa De Roberto (eds.), Il linguaggio formulare in italiano tra sintassi, testualità e discorso. Atti delle Giornate Internazionali di Studio Università Roma Tre, 19–20 gennaio 2012, 153–212. Napoli: Loffredo Editore/University Press.

Drescher, Martina. 2022. The moral taste of food: A discourse analysis of social media discussions about vegetarianism and veganism. In Sofia Rüdiger & Susanne Mühleisen (eds.), IMPACT: Studies in Language, Culture and Society, 35-56. Amsterdam: Benjamins.

Ducrot, Oswald. 1984. Le dire et le dit. Paris: Minuit.

Dufferain-Ottmann, Svenja. 2024. Ansätze für eine romanistische Diskurslinguistik: Die Operationalisierung von ,Stimme‘ am Beispiel des französischen politischen COVID-19-Krisendiskurses. Quo Vadis, Romania? 63. 111-138.

Depuis 2008, les langues régionales sont reconnues comme faisant partie du patrimoine de la France, mais non pas les langues d’outre-mer, sans territoire ou de l’immigration (Cerquiglini 1999). Vue que la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires n’a pas été ratifiée, la valorisation et la survie de ces langues restent fragiles (Rialland/Russo 2023), contrairement à d’autres contextes de langues minorisées dans la Romania (p.ex. les langues de la Sardaigne : Marzo et al. 2022).
Cette section propose de rassembler des contributions innovantes portant sur les effets du multilinguisme résultant de la coexistence des langues de France. Les contributions s’intéressant aux perspectives concernant la divulgation et l’apprentissage des langues de France sont particulièrement bienvenues. Les thématiques abordées pourront notamment inclure :
Promotion et enseignement : Au long des dernières décennies, plusieurs voies d’enseignement des langues régionales se sont intégrées dans le cadre scolaire et extrascolaire ; de nombreuses initiatives se sont établies (Sanchez/Hawkey 2019, Brennan 2024 ; p.ex. croissance étonnante des classes bilingues au Pays Basque) bien que, en même temps, d’autres cours manquent d’élèves ou d’enseignant.e.s.
Malgré le manque de reconnaissance politique, des tentatives locales souvent culturelles (toponymie, évènements, médias, littérature ; Costa 2010) et touchent aux questions d’identité et d’appartenance (Lapresta et al. 2019). Des ressources linguistiques et culturelles même transfrontalières comme l’AEK (langue et culture basque) ou l’Institut Franco-Catalan Transfrontalier peuvent marquer de nouvelles tendances :
Quel rôle jouent les ressources binationales (médias/autres dispositifs) pour la revitalisation ou la post-vernacularisation et pour les personnes investies dans ces processus (Shandler 2008) ?
Multilinguisme : Dans un contexte multilingue il convient également d’examiner les dynamiques entre les langues présentes dans le répertoire linguistique des individus. Cela peut se référer aux dynamiques concernant l’acquisition de la/des L1, L2, L3, des heritage languages (Tomasello 2003, Klann-Delius 2008, Riehl 2014), au phénomène de l’interlanguage ou la dominant language constellation (DLC 1–3). Comment se déroule l’acquisition de langue dans un contexte de précarité linguistique ? Comment appliquer les concepts qui veulent expliquer l’output linguistique comme celui de la muda linguistique (Puigdevall/Pujolar 2015) ? Quel rôle le multilinguisme joue-t-il en diachronie et quels sont les effets du contact linguistique et de la diglossie sur les processus de changement linguistique (Natvig 2019, Wiedner 2024) ?
Néo-locuteurs/néo-locutrices : Quand des personnes apprennent l’une des langues régionales sans qu’elle leur ait été transmise au sein du foyer comme L2, on les appelle néo-locuteurs et néo-locutrices. (O’Rourke et al. 2015). Leurs parcours, bien étudiés en Espagne (Amorrortu et al. 2019, Ramallo/Urla 2021, Collins 2023, Wiedner/Gehring à paraître) ou au Royaume-Uni (Ó hlfearnáin 2015, Carty 2018, Dunmore 2018, Selleck 2018), restent encore peu explorés en France (Hornsby 2007, Costa 2015, Hawkey 2017).

Leurs motivations et pratiques s’inscrivent-elles dans la lignée de celles des autres néo-locuteurs et néo-locutrices ?

Comment peut-on caractériser les langues apprises en comparaison avec celles des locuteurs et locutrices L1 et à l’égard des langues standard ou des dialectes nivelés ?

Quelles langues les néo-locuteurs et néo-locutrices transmettent-ils à leurs enfants ?


Nous demandons des propositions de contribution en français, les résumés n’excédant pas 500 mots (bibliographie exclue). La soumission des résumés se fait à l’aide du formulaire ci-joint. Veuillez envoyer votre proposition jusqu‘au 31 janvier 2026 (date limite) aux adresses suivantes : Fiona.gehring@email.uni-freiburg.de, daniela.marzo@romanistik.uni-freiburg.de, marinus.wiedner@romanistik.uni-freiburg.de.
Les notifications d’acceptation seront envoyées avant le 28 février 2026.


Bibliographie


Amorrortu, Estíbaliz, Maite Puigdevall & Fernando Ramallo. 2019. ¿Qué supone ser neohablante de una lengua minorizada? In Fernando Ramallo, Estíbaliz Amorrortu & Maite Puigdevall (eds.), Neohablantes de lenguas minorizadas en el Estado español, 7–21. Madrid: Iberoamericana Vervuert.


Brennan, Sarah C. 2024. La situation sociolinguistique de l’occitan du début du XXᵉ siècle à nos jours. In Louise Esher & Jean Sibille (eds.), Manuel de linguistique occitane, 593–610. Berlin/Boston: De Gruyter.


Carty, Nicola. 2018. New speakers, potential new speakers, and their experiences and abilities in Scottish Gaelic. In Cassie Smith Christmas, Noel P. Ó Murchadha, Michael Hornsby & Máiréad Moriarty (eds.), New speakers of minority languages: Linguistic ideologies and practices, 253–270. London: Palgrave Macmillan.


Cerquiglini, Bernard. 1999. Les langues de la France: Rapport au ministère de l’Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie.


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Dunmore, Stuart. 2018. New Gaelic speakers, new Gaels? Ideologies and ethnolinguistic continuity in contemporary Scotland. In Cassie Smith Christmas, Noel P. Ó Murchadha, Michael Hornsby & Máiréad Moriarty (eds.), New speakers of minority languages: Linguistic ideologies and practices, 23–44. London: Palgrave Macmillan.


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Ramallo, Fernando & Jacqueline Urla. 2022. Activating new speakers: research among Spain’s historic linguistic minorities. Journal of Multilingual and Multicultural Development 43(1). 1–7.


Rialland, Annie & Michela Russo (eds.). 2023. Les langues régionales de France: nouvelles approches, nouvelles méthodologies, revitalisation. Paris: Société Linguistique de Paris.


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Shandler, Jeffrey. 2008. Adventures in Yiddishland: Postvernacular Language & Culture. Berkeley: University of California Press.


Tomasello, Michael. 2003. Constructing a language: A usage-based theory of language acquisition. Cambridge: Harvard University Press.


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Wiedner, Marinus. 2024. A diachronic study on the preservation of a selection of five phonemes in contemporary Béarnese. Mediterranean Language Review 31. 13–35.

Une fonction fondamentale de la communication consiste à partager ses émotions et ses atti-tudes avec son interlocuteur. Cette fonction émotionnelle ou expressive du langage est consi-dérée comme une constante anthropologique, qui prend toutefois des formes différentes selon les contextes historiques et culturels (Bühler 1999 [1934], Jakobson 2007 [1960], Pustka 2015).
Cette section se concentrera sur la manière dont les nouveaux formats numériques modifient la médiation linguistique et multimodale des émotions : les formats numériques constituent-ils une nouvelle ressource pour la communication des émotions ? Comment ces formats intera-gissent-ils avec les modes de communication existants et les traditions discursives du monde analogique ? L’accent est mis ici sur les actes de parole dans lesquels les émotions sont re-présentées et transmises par le langage : les représentations linguistiques et les variantes d’expression ainsi que les traditions discursives du discours sur les émotions sont au cœur de cette réflexion (cf. Schwarz-Friesel 22013). Dans ce domaine de recherche, la section choisit deux axes prioritaires : premièrement, l’étude des émotions dans les communautés numé-riques structurées autour d’expériences et d’intérêts communs, et deuxièmement, la simulation d’émotions par des agents d’IA qui communiquent avec des humains dans des situations où l’expression émotionnelle joue un rôle central.
La communication dans les communautés numériques est souvent marquée par une forte prédominance de la fonction émotionnelle. Les réseaux sociaux et autres services en ligne offrent des espaces numériques où l’expression, le partage et la libération des émotions oc-cupent une place importante (cf. Reimann 2019, Frick 2020). Aujourd’hui, les plateformes nu-mériques permettant à des personnes en situation de crise d’interagir avec d’autres personnes concernées pour exprimer des émotions telles que la tristesse ou l’angoisse, sous des formes à la fois verbales et multimodales, connaissent un essor considérable (cf. Döveling 2015, Giaxoglou/Döveling 2018).
Un autre contexte fructueux est celui de la mise en scène des relations entre l’homme et l’ani-mal dans la communication numérique par le biais des « petfluencers ». Le phénomène étudié
dans les recherches sur les relations entre l’homme et l’animal, selon lequel les animaux sont utilisés comme source de proximité et d’émotions, est transféré dans l’espace numérique. Il connaît ainsi une intensification et une extension qui doivent être étudiées non seulement d’un point de vue des sciences culturelles, mais aussi du point de vue de la linguistique discursive. Cette section a pour objet d’examiner à partir des corpus la manière dont les traditions discur-sives du monde analogique sont transférées dans l’espace numérique, notamment dans des formats similaires, et dans quelle mesure les environnements numériques dynamisent le dis-cours sur les émotions et constituent ainsi une nouvelle ressource.
Le deuxième axe porte sur les interactions entre l’homme et l’IA, dans lesquelles la fonction expressive du langage est particulièrement dominante. En effet, l’IA génératrice de texte ap-parait comme une ressource potentielle pour la communication des émotions et propose des formats centrés sur les émotions et leur médiation. Le travail de cette section se concentre sur le développement très récent d’agents conversationnels d’IA qui assument le rôle d’interlocu-teurs et prennent en charge des tâches thérapeutiques, que ce soit dans le domaine de la communication consultative en matière de santé ou dans des contextes cliniques (cf. Hatch et al. 2025). Dans ces configurations, outre le conseil spécialisé et la transmission d’informations, la simulation de l’empathie gagne de plus en plus d’importance.
Les mécanismes de cette simulation se reflètent déjà dans les corpus d’interaction avec l’IA actuellement en cours constitution. Dans ce contexte, les textes littéraires traitant de l’interac-tion avec l’IA sont particulièrement révélateurs : ils mettent fréquemment en scène les ambi-guïtés entre les agents IA et les acteurs humains et les développent sous forme narrative. Les textes fictionnels offrent des réflexions explicites sur les transitions possibles entre l’intelli-gence humaine et l’intelligence artificielle, mais ils contiennent également des représentations imaginaires de formes (nouvelles) de communication, qui peuvent être exploitées de manière fructueuse du point de vue de la linguistique interactionnelle.
Outre l’accent thématique mis sur la transmission des émotions dans les espaces numériques, cette section s’inscrit dans une approche fondée sur des corpus, qui examine, à partir de dif-férents contextes numériques, comment les formats numériques récents offrent des res-sources pour le discours émotionnel. Bien que centrée sur la linguistique, la section articule également théories et méthodes linguistiques avec des perspectives littéraires et culturelles, car l’étude des espaces numériques en tant que ressource requiert une approche interdisci-plinaire. Cette ouverture transdisciplinaire est également mobilisée pour mener une réflexion méthodologique sur la question de savoir dans quelle mesure les espaces numériques cons-tituent une nouvelle ressource où la transmission des émotions acquiert une qualité inédite.


Nous demandons des propositions de contribution en allemand ou en français, les résumés n’excédant pas 500 mots (bibliographie exclue). La soumission des résumés se fait à l’aide du formulaire ci-joint. Veuillez envoyer votre proposition jusqu‘au 31 janvier 2026 (date limite) aux adresses suivantes : angela.schrott@uni-kassel.de, werle@uni-kassel.de.

Les notifications d’acceptation seront envoyées avant le 28 février 2026.

Bibliographie

Bühler, Karl. 1999 [1934]. Sprachtheorie. Stuttgart: Lucius & Lucius.

Döveling, Katrin. 2015. Emotion Regulation in Bereavement: Searching for and Finding Emotional Support in Social Network Sites. New Review of Hypermedia and Multimedia 21(1-2). 106–122, https://doi.org/10.1080/13614568.2014.983558.

Frick, Karina. 2020. Graphische Variation im Rahmen emotionaler Online-Praktiken. In Jannis Androu-tsopoulos & Florian Busch (eds.), Register des Graphischen. Variation, Interaktion und Reflexion in der digitalen Schriftlichkeit. 159–182. Berlin, Boston: De Gruyter.

Giaxoglou, Korina & Katrin Döveling. 2018. Mediatization of Emotion on Social Media: Forms and Norms in Digital Mourning Practices. Social Media + Society 4(1), https://doi.org/10.1177/2056305117744393.

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Jakobson, Roman. 2007 [1960]. Linguistik und Poetik. In Roman Jakobson: Poesie der Grammatik und Grammatik der Poesie. Vol.1: Poetologische Schriften und Analysen zur Lyrik vom Mittelalter bis zur Aufklärung. 155–216. Berlin, New York: De Gruyter, https://doi.org/10.1515/9783110206562.1.155.

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Reimann, Sandra. 2019. „Und hab total den Heulanfall bekommen“ – Emotionskulturen im Netz am Beispiel der Selbsthilfeplattform <www.hungrig-online.de>. In Stefan Hauser, Martin Luginbühl & Susanne Tienken (eds.), Mediale Emotionskulturen. 201–221. Frankfurt am Main: Lang.

Schwarz-Friesel, Monika. 22013. Sprache und Emotion. Tübingen: Narr Francke Attempto.

Les corpus linguistiques constituent la base de nombreuses analyses empiriques dans différentes sous-disciplines linguistiques – aussi bien les grands corpus de référence que les innombrables corpus plus petits consacrés à des domaines et des variétés linguistiques plus spécifiques. Toutefois, la mesure dans laquelle ces corpus sont représentatifs d’une communauté linguistique ou d’une variété à un moment donné demeure incertaine. L’élaboration des corpus est souvent inévitablement marquée par des questions méthodologiques, techniques et idéologiques, susceptibles d’influencer la représentativité des résultats (Lemnitzer & Zinsmeister 2015 : 48-55). La linguistique historique, que William Labov définit comme « the art of making the best use of bad data » (Labov 1994 : 11), est particulièrement confrontée à ce problème. Les données historiques sont qualifiées de « mauvaises » parce qu’elles ne reflètent pas l’ensemble de la communauté linguistique. Ainsi, les témoignages linguistiques oraux produits avant l’invention de dispositifs d’enregistrement sonore adéquats sont irrémédiablement perdus. L’orientation historique des archives, qui jusqu’au XIXe siècle servaient principalement un objectif administratif et juridique (Friedrich 2013 : 24), contribue également au caractère lacunaire des données : les documents non officiels ou produits par des groupes socialement défavorisés étaient jugés indignes d’être conservés (Frank-Job & Selig 2016).

Ce problème est particulièrement marquant pour l’étude du français dit « classique ». L’époque concernée se caractérise notamment par les efforts de normalisation menés par les cercles littéraires courtois, qui souhaitaient codifier et implémenter une variété idéalisée du français, c’est-à-dire le bon usage (Funk et al. 2018). En conséquence, de nombreuses histoires de la langue présentent cette période comme une évolution linéaire vers une norme universellement respectée. Aussi compréhensible que soit une telle représentation, elle occulte néanmoins la diversité des formes que la langue populaire, encore en pleine émancipation, a prises sous

l’influence des bouleversements sociaux, culturels, économiques, techniques et politiques. Il faudrait donc recourir à des données qui représentent ces branches de développement (Ayres-Bennett 2014 ; Combettes 2014 ; Siouffi 2019).

Il est encourageant de constater qu’un nombre croissant de travaux scientifiques abordent cette problématique de manière explicite. Ainsi, le corpus sur lequel se fonde la Grande grammaire historique du français (2020) a été délibérément constitué à partir de textes de nature diverse. De même, les ouvrages collectifs dirigés par Baudry & Caron (1998), Ayres-Bennett et al. (2018) et Selig & Linzmeier (2023) traitent des dynamiques au-delà des cercles littéraires courtois ainsi que des types de textes jusqu’alors négligés.

Dans la section envisagée, nous souhaitons poursuivre sur cette voie en focalisant l’époque moderne. Les contributions sont donc bienvenues dans les domaines suivants :

● Méthodologie :

○ Comment appréhender, de manière générale, le caractère non-représentatif et incomplet des corpus ? Quelles sont les approches (plus récentes) pour combler les « lacunes » dans la base de données ? Quelles marges de manœuvre subsistent lorsque l’accès à des sources différenciées est impossible ?

○ Quels « autres » types de sources existent et comment peuvent-ils être identifiés et exploités de manière fructueuse ?

○ Comment dévoiler et briser les mécanismes de formation du pouvoir ?

● Gestion des données :

○ Comment concevoir une gestion des données de recherche réussie et sensible au canon des données ?

○ Comment démocratiser les corpus et leur accès ?

○ Quel est le rapport entre les types de sources « anciennes » / « traditionnelles » et « nouvelles » / « autres » dans la constitution du corpus ?

● Études de cas :

○ Quelles conclusions peut-on tirer des études de cas qui s’appuient sur des sources marginalisées, sur d’« autres ressources » ?

○ Comment les compositions conventionnelles du corpus peuvent-elles être problématisées ou complétées par des analyses concrètes ?

Nous demandons des propositions de contribution en allemand ou en français, les résumés n’excédant pas 500 mots (bibliographie exclue). La soumission des résumés se fait à l’aide du formulaire ci-joint. Veuillez envoyer votre proposition jusqu’au 31 janvier 2026 (date limite) aux adresses suivantes : eva-katharina.fezer@uni-tuebingen.de, desiree.kleineberg@uni-bielefeld.de, karina.slunkaite@rose.uni-heidelberg.de.

Les notifications d’acceptation seront envoyées avant le 28 février 2026.

Bibliographie

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